Cet article est dédié aux parents dont leurs enfants mineurs résidant habituellement en France ont été enlevés par l’un des parents et emmenés en Russie pour y vivre.
Il arrive malheureusement des cas de rupture parmi les couples franco-russes installés en France qui ont des enfants mineurs et qui ne trouvent pas de solution à l’amiable pour organiser la garde des enfants sur le sol français.
Bien souvent, ce sont les mères russes qui prennent de telles décisions de partir en Russie car elles comprennent qu’étant dans une situation précaire les pères français ont plus de chance d’obtenir la garde de leurs enfants.
Pour cela, les mères russes quittent la France en voiture à l’aide d’amis afin d’éviter toute arrestation à l’aéroport. Un tel déplacement s’organise sur plusieurs jours, voire semaines ou mois. Ainsi, les pères doivent agir très vite pour empêcher son ou ses enfants de quitter la France, parce qu’après le déplacement en Russie, cette situation devient complexe et difficile à régler.
Normes en vigueur entre la France et la Russie
En ce qui concerne le droit international en la matière, la Convention de la Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants est entrée en vigueur en France le 1er décembre 1983 et en Russie le 1er octobre 2011.
La Russie a également adhéré, par la loi fédérale du 5 juin 2012, à la Convention de la Haye du 19 octobre 1996 « Convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants ». Quant en France, elle est entrée en vigueur le 1er février 2011.
Ainsi, depuis l’année 2012, résoudre cette situation entre la France et la Russie est possible à l’aide des Conventions mais reste très difficile.
En effet, la Russie ne reconnaît pas comme délit un tel déplacement d’enfant par son propre parent. Une fois que la mère avec son enfant se trouve sur le sol russe, elle est protégée par la loi russe, et ce, quelle que soit la nationalité de l’enfant.
Procédure
Afin d’assurer le retour de l’enfant illicitement déplacé sur le sol russe, plusieurs conditions doivent être réunies et pas seulement l’existence d’un jugement français sur l’enlèvement d’enfant et le droit de garde attribué au parent français. Comme toute procédure judiciaire, cela peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années.
Quelle est la juridiction compétente dans les cas d’enlèvement d’enfants entre la France et la Russie ?
La France conserve la juridiction si :
- l’enfant était enlevé illicitement en violation d’un droit de garde conformément à l’article 7 de la convention du 1996 ;
- l’enfant n’était pas installé à titre habituel en Russie, par exemple, il est seulement hébergé chez les amis de sa mère ou/et il n’est pas scolarisé. En revanche il peut vivre chez ses grands-parents russes à titre habituel. En Russie c’est une situation normale ;
- la France n’a pas demandé à la Russie d’accepter la compétence pour prendre la décision de retour si les deux États considèrent que tel est l’intérêt supérieur de l’enfant.
La Russie a le droit de décider sur le retour de l’enfant en France si :
- l’enfant était enlevé illicitement en violation d’un droit de garde conformément à l’article 7 de la convention du 1996 mais il a résidé en Russie pour une période d’au moins un an après que son parent français, ayant le droit de garde a connu ou aurait dû connaître le lieu où se trouvait l’enfant, aucune demande de retour présentée pendant cette période n’est encore en cours d’examen ;
- et l’enfant s’est intégré dans son nouveau milieu ;
- la France a demandé à la Russie d’accepter la compétence pour prendre la décision de retour.
Malheureusement, pendant la procédure, l’enfant déplacé en Russie bien souvent commence à oublier la langue française et à s’habituer à son nouveau milieu. Ce facteur sera pris en compte lorsque le dossier sera étudié par la juridiction russe.
Le juge va se poser les questions suivantes : Depuis combien de temps il est déjà en Russie ? Dans quelles conditions il vit ? Quel est son avis (selon l’âge) sur son déplacement ? Quel est son état psychologique ? Parce que le juge doit prendre la décision dans l’intérêt de l’enfant.
Ainsi, selon chaque situation, la décision du tribunal sera différente.
Exemple 1
Le couple franco-russe avec les enfants vit en France. La mère déplace illicitement les enfants en Russie en mars 2012. Conformément à la convention du 1980, le père demande par voie juridictionnelle en Russie le retour de ses enfants en France, mais la Russie refuse le retour car les enfants n’ont pas souhaité revenir chez leur père.
En mai 2013, la solution sur le droit de garde des enfants n’est pas trouvée et le père ne donne pas son accord pour que les enfants restent en Russie.
Dans ce cas, la Russie conserve la juridiction car les deux enfants résident à titre habituel en Russie depuis plus de 12 mois et se sont habitués à leur nouveau milieu.
Exemple 2
Le père russe déplace illicitement l’enfant en Russie en janvier 2014. La mère demande à la Russie par voie juridictionnelle le retour de son enfant en France conformément à la Convention 1980, mais la Russie refuse à la mère française en mars 2014 pour le motif que cela peut traumatiser l’enfant (l’article 13 (1) b de la convention 1980). Elle décide de demander à son pays de statuer sur le droit de garde de son enfant.
Puisque le délai d’un an n’a pas encore dépassé depuis que la mère a pu connaître l’adresse de son enfant en Russie, la France conserve la juridiction.
Mais la France décide que la Russie est mieux placée pour apprécier l’intérêt de l’enfant (l’article 8 (2) de la convention 1996). Dans ce cas, la France peut demander directement au tribunal compétent ou via l’autorité centrale de la Russie pour que le tribunal russe prenne la décision sur le droit de garde de l’enfant. Le tribunal français peut également surseoir à statuer et demander aux parents à saisir la justice russe sur cette question.
Les démarches à suivre en urgence :
Avant toute démarche, il appartient d’apporter des éléments justificatifs sur une résidence habituelle en France avant le déplacement.
- Il est important de déposer une main courante pour prévenir le déplacement hors territoire français.
Contactez la police ou la gendarmerie de votre lieu de résidence dès que vous soupçonnez ou constatez le déplacement de votre enfant.
- Prenez contact dans les meilleurs délais avec l’autorité centrale française pour les enlèvements internationaux d’enfants dont les coordonnées sont ci-dessous.
- Prenez contact avec un avocat russe spécialisé dans le domaine d’enlèvement d’enfants.
Contacts
- L’autorité centrale chargée de la mise en œuvre des conventions en matière de déplacements internationaux d’enfants est, pour la France, le bureau du droit de l’Union, du droit international privé et de l’entraide civile, de la Direction des Affaires Civiles et du Sceau du Ministère de la Justice.
13 Place Vendôme
75042 PARIS Cedex 01
Tél. : 01.44.77.61.05
- L’autorité centrale chargée de la mise en œuvre des conventions en matière de déplacements internationaux d’enfants est, pour la Russie : Le ministère de l’éducation.
Si votre enfant a été emmené en Russie mais que vous ne savez pas précisément où, l’autorité centrale pourra solliciter les services de police disposant de moyens d’investigation sur place.
L’autorité centrale peut également conseiller le tribunal compétent pour statuer sur le droit de garde de votre enfant.
The Ministry of Education and Science of the Russian Federation
Department for children’s rights protection state policy
Lyusinovskaya street, 51,
Moscow,
Russia, 117997
Telephone numbers: +7 (499) 237 9411
Fax number: +7 (499) 237 5874
E-mail: d07@mon.gov.ru
- Les services de médiation internationale existent tant en France qu’en Russie, et peuvent proposer des médiations ou co-médiation entre les deux pays (par téléphone ou par skype). Il convient pour cela de contacter :
- soit la Cellule de médiation internationale du ministère de la justice : emile.ajavon@justice.gouv.fr
- soit l’Institut fédéral de médiation russe : o.saraykina@fedim.ru ou schepetkova-an@mon.gov.ru
- soit les deux.